mercredi 20 avril 2011

Letty Lynton 1932

Captive

Un film de Clarence Brown avec Joan Crawford, Robert Montgomery, Nils Asther, Lewis Stone et May Robson

Letty (J. Crawford), une riche héritière, mène une vie débridée en Amérique du Sud depuis plusieurs mois. Elle voudrait échapper à son amant Emile Renaul (N. Asther) dont elle a peur. Elle réussit à prendre le bateau pour rentrer en Amérique. A bord, elle rencontre Jerry Darrow (R. Montgomery) dont elle tombe amoureuse...

Ce film de Clarence Brown est célèbre à cause de son contenu - hautement immoral - ainsi qu'à cause du procès pour plagiat du scénario. Ce procès a malheureusement eu pour effet de rendre le film quasiment invisible jusqu'à ce jour. Il n'a jamais été diffusé en VHS, ni en DVD, et il ne passe plus à la télévision. Heureusement, il reste quelques copies (de qualité très médiocre) qui circulent et permettent de voir ce film 'maudit'. Le scénario est basé sur un roman de Marie Belloc Lowndes, l'auteur de The Lodger, inspiré par un cas d'empoisenement célèbre, 'The Edinburgh Case' dont David Lean fera plus tard également un film, intitulé Madeleine (1950). Malheureusement, à cause d'une autre pièce de théâtre intitulée Dishonored Lady d'Edward Sheldon, qui racontait la même histoire, on attaqua le studio MGM pour plagiat. Après de longs développements judiciaires, la MGM craignit que tous les profits du film ($600.000) ne passent entre les mains des plaignants. Mais, en appel, seule une porportion des profits (égale à la portion du texte plagié) devait être payée. Néanmoins, depuis ce temps, la MGM ne sort plus le film. Ce procès assez rocambolesque serait suffisant pour rendre le film célèbre. Mais, en fait, le contenu même du scénario est de la dynamite. Joan Crawford y est une riche héritière à la vie sexuelle débridée en compagnie d'un individu louche (le suédois Nils Asther) qu'elle n'aime pas. L'ayant quitté subrepticement, elle tombe dans les bras du gendre parfait, en la personne de Robert Montgomery. Hélas, son ex-amant est déjà arrivé à New York et menace d'exposer son passé. Joan pense au suicide et emporte du poison pour une dernière confrontation avec Nils. Il la frappe et la bat. Mais, c'est lui qui boit le champagne empoisonné. Elle l'insulte en le traitant de 'Mongrel' (bâtard) alors qu'il meurt. Joan devient une meutrière au sang froid parfait qui efface les traces de son passage. Et elle observe même le serveur qui entre dans la pièce et boit du champagne dans le verre empoisonné sans même lever un sourcil. C'est le final du film qui est totalement détonnant. Letty est convoquée chez le juge d'instruction (L. Stone) à la suite du meurtre. Mais, elle en sort libre et sans procès aprés avoir reçu le soutien de son fiancé (Montgomery), de sa mère et de sa bonne ! C'est probablement un des seuls films jamais produit à Hollywood où une meurtrière échappe à toutes sanctions grâce à ses mensonges et à ceux des siens. Elle vivra donc heureuse après avoir éliminé un amant gênant. Rien que pour cela, l'exploitation d'un tel film devenait impossible après l'adoption du Production Code au milieu de 1934. Le film fut en tous cas un gros succès (sauf en Grande-Bretagne où il fut interdit). La robe en organdi blanc, signée Adrian, que porte Joan Crawford (voir ci-dessus) fut copiée et vendue par le grand magasin Macy's de New York à plus de 50.000 exemplaires. D'ailleurs, Joan porte dans le film des vêtements parfaitement en phase avec son héroïne comme un manteau au large col de fourrure qui la fait presque disparaitre. Il m'est difficile de parler de la cinématographie du film (signée du talentueux Oliver T. Marsh) car la copie que j'ai vue est trop mauvaise. Mais, il ne fait aucun doute que ce mélo est très bien dirigé par Clarence Brown. Il trouve toujours l'angle qu'il faut pour suggérer les rapports entre les personnages. Quand Joan rentre à la maison et arrive en haut d'un immense escalier, nous découvrons sa mère - qui la déteste - par une porte ouverte, une belle utilisation de la profondeur de champ. Espérons que ce film de Clarence Brown redeviendra visible, comme le sera bientôt Night Flight (1933).

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