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C'est en 1918 qu'il rencontre au cours d'un tournée théâtrale, Thelma Raye, une actrice qui a déjà un pedigree dans le West End. Il l'épouse en septembre 1919. Ce mariage va se révéler rapidement une erreur lourde de conséquences; Thelma est dominatrice et d'une jalousie maladive. Il se sépareront dès 1922; mais, il faudra à Colman plus de 12 ans pour obtenir le divorce. Mais, n'anticipons pas! A l'automne 1920, le travail en Angleterre, aussi bien au théâtre qu'au cinéma, se fait rare. Il décide d'aller tenter sa chance sous d'autres cieux. Il économise suffisament d'argent pour s'acheter un aller simple en 2ème classe pour New York. Il part avec bien peu de choses: trois cols de rechange, quelques vêtements et £8 en poche plus deux lettres de recommandations dont une pour D.W. Griffith. L'arrivée à New York se révèle fort difficile. Les studios de cinéma sont fermés; ses lettres se révèlent inutiles et il lui faut trouver rapidement un emploi quelconque pour subvenir à ses besoins. Après plusieurs mois où il survit difficilement, il arrive à obtenir de petits rôles à Broadway, suivis d'une tournée à travers les Etats-Unis pour une pièce de W. Somerset Maughan. Puis, la chance lui sourit lorsque Ruth Chatterton, une actrice très en vue, lui offre le second rôle masculin dans
La Tendresse, une pièce d'Henri Bataille en 1922. Le critique redouté du New York Times, Alexander Woolcott écrit à son propos:
"une excellente interprétation, franche et authentique est donnée par un acteur nommé Ronald Colman." 
Au même moment, le réalisateur Henry King est à la recherche d'un acteur "de type italien" pour son prochain film avec Lillian Gish,
The White Sister quand le photographe James Abbé lui recommande d'aller voir le jeune premier qui joue avec Ruth Chatterton à l'Empire Theatre. Séduit par les qualités de l'acteur et son physique de brun aux yeux sombres, il vient le trouver dans sa loge pour lui proposer de faire un bout d'essai. Colman est réticent; son expérience cinématographique en Angleterre ne l'a guère enthousiasmé. On lui a répété plusieurs fois qu'il n'avait aucune photogénie. Il se présente néanmoins au rendez-vous et King le fait parler pour le détendre. Il décide de modifier légèrement son apparence en lui dessinant une moustache avec un crayon de maquilleur, puis en lui lissant les cheveux en arrière. Gish et King sont ravis du résultat du bout d'essai. Il prend donc le bateau pour Naples en octobre 1922 avec tous les comédiens et techniciens du film. Gish et King, durant la traversée, lui inculquent les principes de l'interprétation au cinéma et lui font perdre ses manières théâtrales. Il s'adapte rapidement au nouveau medium et découvre que son image à l'écran n'est pas aussi affreuse qu'il le pensait! Il travaille, il est vrai, avec les meilleurs professionnels de l'époque qui ont une connaissance des éclairages largement supérieure à celle du cinéma britannique. Henry King éprouve quelques difficultés à lui faire tourner une scène qui réclame une violence d'expression qui lui est étrangère. Il lui faire boire quelques verres de whisky pour le détendre. La ruse fonctionne et la scène est dans la boîte! La vision de
The White Sister aujourd'hui révèle un acteur naturel, infiniment plus moderne que ses contemporains (Valentino et Gilbert). Son image est déjà là parfaitement définie: l'élégance, les bonnes manières, l'humour et un charisme qui ne se démentiront pas durant 35 ans. Quand The White Sister sort sur les écrans New Yorkais fin 1923, il passe du statut d'acteur inconnu à celui de star. Plusieurs producteurs se disputent ses services. Il va signer avec un producteur indépendant qui vient tout juste de créer sa propre société: Samuel Goldwyn. Ce sera le début d'une association de 9 ans.
3 commentaires:
Hello Ann,
Le parcours de Ronald Colman est-il typique des acteurs anglais de l'époque ? Il me semble que le cinéma anglais de l'immédiat après-guerre (la première) ne brillait pas particulièrement ni par la qualité de ses scénarios, ni par le brio de la mise en scène, ce qui a dû pousser pas mal de gens, professionnels ou en cours de le devenir dans ce milieu, à s'exiler à Hollywood, ce qui était peut-être moins le cas pour d'autres cinématographies européennes (scandinaves ou allemandes). Il aura tout de même eu une chance fantastique de rencontrer tout de suite King Vidor, qui a su repérer tout son potentiel, et l'aider à tracer les grandes lignes de son personnage.
Non, son parcours n'est pas typique pour cette époque. Il y a très peu d'anglais à Hollywood dans les années 20 (à part Chaplin!). Le grand afflux britannique viendra plus tard, à l'arrivée du parlant en 1930.Et il a été découvert par Henry King (pas Vidor, avec qui il travaillera plus tard en 32).
Oooops ! Mon clavier a fourché, je confonds toujours les deux "King" (bien qu'il s'agisse du nom d'un côté et du prénom de l'autre et que leurs styles soient différents), en plus, c'était clairement écrit sur (et sous) l'affiche...
Pour ce qui concerne les relations Europe-Hollywood, j'espère que tu auras l'occasion de les évoquer, compte tenu de l'importance de l'émigration qui a, en partie, façonné Hollywood.
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