dimanche 30 août 2015

The Fire Brigade 1927

Terry O'Neil (Charles Ray)
La Grande alarme
Un film de William Nigh avec Charles Ray, May McAvoy, Holmes E. Herbert, Erwin Connelly et Bert Woodruff

Dans la famille O'Neil, on est sapeur pompier de père en fils. Les deux fils aînés décèdent suite à un incendie et le cadet Terry (C. Ray) prend son poste dans la brigade. Il découvre que les bâtiments construits par Wainright (Erwin Connelly) ne respectent aucune norme et s'effondrent comme des chateaux de cartes en cas d'incendie...

Cette production MGM m'avait toujours intriguée après en avoir vu quelques extraits dans le documentaire Hollywood (1980) de D. Gill & K. Brownlow. Le réalisateur n'est pas un grand nom dans l'histoire du cinéma bien qu'il ait co-réalisé un excellent western en 1914 intitulé Salomy Jane. Si le film n'a toujours pas fait l'objet d'une restauration, c'est certainement parce qu'aucune grande star ne figure au générique. Charles Ray fut pourtant un nom important dans l'industrie du cinéma de l'époque. Il joue ici un pompier sans peur et sans reproches prêt, comme tous les autres membres de sa famille, à sacrifier sa vie pour sauver celle des autres. Le film semble être une célébration du courage de la corporation des pompiers. Cependant, il met aussi en cause des élites corrompues qui n'hésitent pas à construire des bâtiments au rabais en ignorant les normes de sécurité ou pire encore, en fabriquant du béton friable avec beaucoup de sable, moins cher que le ciment. C'est certainement un des aspects les plus intéressants du film, mais qui n'est malheureusement pas totalement exploité. Du point de vue des décors et des effets spéciaux, le film est une totale réussite avec, comme clou du spectacle, le gigantesque incendie d'un orphelinat avec des murs qui s'effondrent, une enfant perchée sur le toit et Charles Ray en pompier téméraire qui grimpe pour la sauver. Le suspense final est très efficace avec un montage très bien structuré. L'action secondaire du film repose sur l'histoire d'amour entre le jeune pompier (Charles Ray) et une jeune héritière (May McAvoy) dont le père (H.E. Herbert), un riche philantrope, se révèle être une crapule. Un excellent divertissement qui tient en haleine.

samedi 29 août 2015

Jazz Mad 1928

Prof. Hausmann (Jean Hersholt)
Un film de F. Harmon Weight avec Jean Hersholt, Marian Nixon et Roscoe Karns

Le professeur Hausmann (J. Hersholt) quitte la petite ville d'Allemagne où il vivait avec sa fille Eva (M. Nixon) pour l'Amérique où il espère pouvoir faire jouer sa symphonie. Une fois sur place, il ne parvient pas à intéresser un orchestre à sa musique. Désespéré, il accepte de participer à un numéro de music-hall où il doit se ridiculiser en chef d'orchestre...

Parmi la production Universal de Carl Laemmle des années 20, on trouve des petites perles comme ce film méconnu sur un musicien allemand qui ne parvient pas à percer dans le monde fermé de la musique symphonique américaine. Le titre ne correspond absolument pas au contenu du film, le titre original Symphony étant considéré comme pas assez vendeur. Malgré cette concession au commerce, le film se révèle être un mélodrame émouvant superbement interprété par Jean Hersholt. Cette acteur protéiforme pouvait tout aussi bien être un bandit ou un brave homme. Son professeur Hausmann est un compositeur qui va de déception en déception, incapable d'intéresser une seule institution musicale à son oeuvre pourtant remarquable. Il fait ce constat amer: "Chez moi en Allemagne, il n'y avait pas d'argent pour monter une symphonie. Ici, en Amérique, il y a de l'argent, mais personne ne s'intéresse à la musique." Contraint à donner des leçons de piano à des enfants, il doit aussi accepter que ce soit sa fille Eva qui subvienne à leurs besoins. Nous sommes bien loin de la célébration du modèle américain, le pays qui devrait donner sa chance à tous. Dans une scène poignante, le vieux professeur accepte de diriger un groupe de musiciens incompétants devant un public de night-club qui les mitraillent de légumes divers. Sombrant dans la dépression, il ne devra son salut qu'à la technique peu orthodoxe d'un agent de music-hall - joué par Roscoe Karns - qui va réussir à faire jouer son oeuvre en jetant littéralement la partition de la symphonie sur le bureau d'un chef d'orchestre avant de l'enfermer. Le clou du film est la scène finale tournée à l'Hollywood Bowl avec un véritable orchestre symphonique où Hersholt sort de sa dépression en reconnaissant son oeuvre. Il a enfin réalisé son rêve et son oeuvre est applaudie par les milliers de spectateurs. Une très belle composition de Jean Hersholt qui évoque l'Emil Jannings de The Way of All Flesh (1927).

One Week of Love 1922


La Prisonnière
Un film de George Archainbaud avec Elaine Hammerstein, Conway Tearle, Kate Lester et Hallam Cooley

La riche héritière Beth Wynn (E. Hammerstein) ne vit pour le plaisir et les sensations fortes. Aux commandes de son avion, elle s'écrase sur une maison isolée au Mexique. Capturée par deux Mexicains, elle est rachetée pour 5 dollars par Buck Fearnley (C. Tearle) qui l'emmène dans sa cabane au milieu des montagnes...

Lewis J. Selznick, le père de David O., fut un producteur important jusqu'en 1923, année où il fit faillite. Avec One Week of Love, il avait sur le papier tous les ingrédients pour un succès populaire: une riche héritière qui organise des soirées débridées, un crash d'avion, une histoire d'amour contrariée et pour finir une catastrophe ferroviaire spectaculaire. Bien que tous ces éléments disparates fleurent bon les clichés cousus de fil blanc, ce film spectaculaire à plus d'un titre se regarde avec plaisir et sans ennui. Le Français immigré George Archainbaud maintient le suspense et l'humour tout le long de ce récit rocambolesque et les acteurs semblent prendre un réel plaisir en interprétant des personnages très typés. Conway Tearle est ici à contre-emploi. Loin de ses rôles distingués, il est un renégat américain vivant caché au Mexique avec des manières de rustre. Il est le parfait contrepoint à Elaine Hammerstein en fille à papa capricieuse et entêtée. Ce sont bien entendu des clichés bien connus et sans suprise, pourtant on est tenu en haleine jusqu'à la dernière minute. Le récit est pimenté de scènes spectaculaires parfaitement réalisées et donnant le sentiment du réel. Ainsi l'avion de l'héroine s'encastre dans une maison en chutant au sol avec une cascade aérienne digne de Wings (1927). Le clou final est encore plus roboratif. On y voit un train lancé à pleine vitesse tomber d'un pont en treillis dans une rivière en crue. Les effets spéciaux sont remarquables et montrent que la production n'a pas mégoté sur les moyens. Ce film distille un de ces petits plaisirs coupables que l'on ressent devant un film qui empile les situations dramatiques, mais qu'on ne peut pas tout à fait prendre au sérieux. Passant de la comédie au western puis au film-catastrophe, One Week of Love est un patchwork réjouissant pour tout amateur de film muet.

Butterfly 1924

Sur le plateau de Butterfly, Kenneth Harlan, Laura La Plante, 
Norman Kerry, Ruth Clifford et Clarence Brown

La Papillonne
Un film de Clarence Brown avec Laura La Plante, Kenneth Harlan, Ruth Clifford et Norman Kerry

Hilary (R. Clifford) travaille comme secrétaire pour assurer l'avenir de sa soeur surnommée Butterfly (L. La Plante) qui étudie le violon. Mais, cette derière s'entiche de Craig (K. Harlan), le patron d'Hilary et l'épouse...

Craig (K. Harlan), Butterfly (L. La Plante)
et Kronski (N. Kerry)
Clarence Brown, qui a avait appris son métier de réalisateur auprès de Maurice Tourneur, était devenu lui-même un metteur en scène de renom en 1924 à la Universal où il enchaîna une suite de films remarquables: The Signal Tower (1924), Smouldering Fires (1924) et The Goose Woman (1925). Butterfly, tout comme Smouldering Fires, trace le portrait de deux soeurs que tout oppose. L'aînée Hilary est prête à tous les sacrifices pour assurer le bonheur de sa cadette alors que cette dernière est un petit monstre d'égoïsme et ne songe à qu'à s'amuser. Son surnom de Butterfly (papillon) n'est pas usurpé; son coeur passe d'un homme à un autre rapidement sans penser aux conséquences. Sur cette trame tirée d'un roman de Kathleen Norris somme toute assez banale, Brown réussit à nous tenir en haleine du début à la fin grace à une direction d'acteur remarquable et une mise en scène pleine d'originalité. Au lieu de se contenter d'un gros plan du visage de son (anti-)héroine, il nous montre les pieds de Laura La Plante ou sa nuque suggérant l'agacement ou l'excitation de Butterfly. Cette femme-enfant est à la fois exaspérante et innocente. Elle pense que tout lui est dû. C'est certainement la faute de sa soeur qui lui a servi de mère et qui lui a passé tous ses caprices. Cette dernière se met tout de même en travers du chemin de celle-ci lorsqu'elle s'apprête à lui prendre l'homme qu'elle aime. La scène finale qui suggère un retour à la normale, avec Butterfly enceinte dans les bras de son époux suscite cependant le doute. Elle ne paraît pas le moins du monde comblée, mais elle doit accepter l'inévitable. Aucun des acteurs n'était une star à la sortie du film, mais il permit à Laura La Plante de gagner ses galons de vedette et Brown fut applaudi pour son travail. Espérons qu'un jour les films Universal de Clarence Brown seront disponibles en DVD!

vendredi 28 août 2015

The Home Maker 1925

Eva (Alice Joyce) et Lester Knapp (Clive Brook)
Le Gardien du foyer
Un film de King Baggot avec Clive Brook, Alice Joyce et George Fawcett

Employé dans un grand magasin, Lester Knapp (C. Brook) attend depuis des années une éventuelle promotion qui lui permettrait d'améliorer la vie de sa femme Eva (A. Joyce) et de ses trois enfants. En fait de promotion, il est licencié. Desespéré, il songe à mettre fin à ses jours pour que sa famille puisse toucher son assurance-vie...

Le réalisateur King Baggot est surtout connu pour ses films d'action comme Tumbleweeds (1925). Pourtant, The Home Maker se révèle être un fascinant portrait d'une famille américaine dans sa vie de tous les jours. Prédatant de plusieurs années le chef d'oeuvre The Crowd (La Foule, 1928) de King Vidor, il nous montre sans fioritures la dureté de l'existence d'un couple d'Américains moyens qui luttent pour éléver leur famille. Pendant de Lester travaille sans entraint dans un bureau, Eva besogne du matin au soir, récurant, lavant, cuisinant et réprimandant son petit Stevie qui fait bêtise sur bêtise. Lester n'aime pas la compétition et la promotion tant attendue n'arrivera jamais. Eva de son côté est fatiguée par ses journées interminables qui lui minent le moral. Le film prend alors une tonalité nettement plus sombre lorsque Lester, désespéré, tente de mettre fin à ses jours en faisant croire à un accident. A bout de ressources, il ne voit aucune autre issue pour subvenir aux besoins de sa famille. En fait, il ne meurt pas de sa chute, mais il se retrouve paralysé. De ce malheur va finalement naître le bonheur. Comme son époux ne peut plus travailler, Eva prend le rôle de chef de famille et part travailler. Elle se révèle une employée pleine de ressources et est rapidement promue. De son côté, Lester s'épanouit à la maison en s'occupant de ses enfants. L'ensemble de la famille a trouvé son équilibre et même le petit Stevie devient un enfant sage. Cette inversion des rôles dans la société des années 1920 est particulièrement remarquable et inattendue. Evitant la mièvrerie et le paternalisme, King Baggot réussit à nous émouvoir avec cette histoire simple magistralement interprétée par Alice Joyce, qui sortait de son rôle habituel de femme de la haute société, et par le Britannique Clive Brook qui joue son rôle de père au foyer avec subtilité et humour. Voici un excellent film qui mériterait d'être mieux connu.

mardi 18 août 2015

Why be Good? 1929


Un film de William A. Seiter avec Colleen Moore, Neil Hamilton et Edward Martindel

La jolie et vive Pert Kelly (C. Moore) est vendeuse dans un grand magasin. Le soir, elle fréquente assidument les dancings où elle gagne des compétitions de Charleston endiablées. C'est ainsi qu'elle fait la connaissance de Winthrop Peabody Jr. (N. Hamilton) et flirte longuement avec lui. Elle ignore qu'il est le fils de son patron...

Ce film présumé perdu depuis des décennies a été retrouvé et restauré en 2014. Il est sorti en DVD la même année chez Warner Archive. Cette sortie ultra-rapide pour un film muet était, il est vrai, facilitée par la redécouverte simultanée de la bande-son Vitaphone avec laquelle le film était sorti en 1929, à l'orée du parlant. Il s'agit bien d'une oeuvre muette, mais accompagnée d'une partition musicale qui mêle le jazz, le charleston et les chansons des années 1920. On est replongé immédiatement dans l'époque des "flappers", ces jeunes filles coiffées à la garçonne qui entendent mener une vie libre, cependant dans les limites de la bienséance bourgeoise. On a oublié aujourd'hui que Colleen Moore fut la première et la plus célèbre flapper des années 1920 grâce à son rôle dans Flaming Youth (1922) de J.F. Dillon, un film qui n'existe plus qu'à l'état de fragments. L'actrice avait totalement changé de look en coupant ses anglaises pour une coupe au carré inspirée par sa poupée japonaise. Avec son corps gracile et son allure androgyne, la petite Colleen Moore impose un nouveau style de femme qui n'hésite pas à flirter et qui danse jusqu'à trois heures du matin un charleston endiablé. Elle se veut libérée bien qu'en fait, elle n'aille jamais jusqu'à bout de ses pulsions. Elle évite habilement de boire pour savoir contrer des hommes trop entreprenants. Son image de 'bad girl' n'est en fait qu'une façade où elle cache une vie finalement très rangée chez ses parents. Mais, elle estime nécessaire que faire croire qu'elle est une fille légère dans le milieu où elle travaille en tant que vendeuse. L'intrigue n'est pas très originale car de nombreuses autres stars des années 20 ont également interprété une petite vendeuse qui tombe amoureuse de son patron, ou de son fils comme Mary Pickford dans My Best Girl (1927) ou Clara Bow dans It (1927). Ce qui différencie Why be Good de ces autres films, c'est la performance pleine d'entrain et de charme de Colleen Moore qui réussit à nous captiver par son humour pétillant. William A. Seiter est un bon artisan qui sait très bien maintenir le rythme de cette comédie très réussie. Un vrai bonheur de redécouvrir Colleen Moore dans ce très joli film!

dimanche 16 août 2015

A tolonc 1914

L'indésirable
Un film de Mihály Kertész (Michael Curtiz) avec Lili Berky, Várkonyi Mihály et Mari Jászai

A la mort de son présumé père, Liszka (L. Berky) apprend qu'elle n'est pas sa fille. Elle quitte son village pour devenir servante chez une veuve. Elle tombe amoureuse de son fils Miklós (V. Mihály). Puis, elle est accusée de vol...

Mihály Kertész (alias Michael Curtiz) en 1914
Il y a fort à parier que ce film muet hongrois n'aurait jamais fait l'objet d'une restauration si le réalisateur n'avait pas fait ensuite carrière aux Etats-Unis sous le nom de Michael Curtiz. Adapté d'une pièce hongroise, cette production fait appel aux talents des acteurs du Théâtre National de Kolozsvár (de nos jours, Cluj en Roumanie). Le résultat est du théâtre filmé sans grand relief, à part quelques incursions bienvenues dans les paysages de Transylvannie. La filmographie muette de Kertész est fort peu enthousiasmante en comparaison de la grande période Warner des années 30 de Curtiz. Le cinéma de minuit nous avait présenté il y a quelques années un beau navet intitulé Das Spielzeug von Paris (1925) de sa période autrichienne avec la minaudante Lili Damita, son épouse d'alors. A tolonc est un peu plus intéressant en ce qu'il nous montre des Hongrois avec leurs us et coutumes. On peut remarquer aussi parmi les acteurs hongrois oubliés de ce petit film, le bellâtre Várkonyi Mihály qui fit plus tard carrière à Hollywood sous le nom de Victor Varconi. On peut le voir en particulier dans The Volga Boatman (1926) de Cecil B. DeMille. Pour ce qui est des metteurs en scènes hongrois  du muet, je me souviens avoir vu une bande bien plus intéressante signée Alexander Korda intitulée Eine versunken Welt (1922) avec Maria Corda et de nouveau Victor Varconi. 

mercredi 5 août 2015

Maurice Tourneur - Réalisateur sans frontières (VI)


Une excellente critique de ma biographie de Maurice Tourneur dans 
le numéro de Télérama du 5 août 2015:

lundi 3 août 2015

Maurice Tourneur in Sight & Sound


I'm very proud to mention my first article in the September 2015 issue of the prestigious magazine Sight & Sound. It focuses on the premiere of Maurice Tourneur's Alias Jimmy Valentine (1915). My biography of Maurice Tourneur is available from La Tour Verte.