En 1916, Ronald Colman debute au London Coliseum (l'actuel English National Opera) dans un tout petit rôle. Il est handicapé par sa blessure à la jambe qui le fait boîter. Il lui faudra plusieurs années pour se débarrasser de ce défaut. Mais, cette ouverture lui permet de rencontrer quelques uns des acteurs les plus en vue du West End. Il est difficile de savoir quels acteurs l'influencèrent le plus à cette époque; mais, il y en a un qui se détache: Gerald du Maurier. Ce grand nom de la scène anglaise a été éclipsé, dans la mémoire collective, par son illustre père, l'écrivain et caricaturiste George du Maurier (auteur de Peter Ibbetson) et par sa fille, l'écrivain Daphne du Maurier (auteur de Rebecca). Mais, les commentateurs de l'époque parle de son jeu naturel, sans emphase et tout en suggestion. La modernité de cet acteur a dû frapper le jeune Colman et l'influencer énormément.
La chance est de son côté car les jeunes premiers manquent cruellement aux théâtres londoniens à cause la guerre. En 1917, il décroche un rôle dans une pièce à scandale, Damaged Goods (Les avariés) d'Eugène Brieux, un auteur français en vogue à cette époque. La pièce s'attaque à un tabou que la bonne société se refuse à discuter, la syphilis. Il y tient le rôle d'un jeune époux qui a contaminé par mégarde son épouse. C'est un succès de scandale qui lui permet de se faire remarquer par un des pionniers du cinéma britannique, George Dewhurst. Ses premiers pas au cinéma ne semble guère l'avoir enthousiasmé. "Combien gagnerais-je?", demanda-t-il à Dewhurst. "Bien, c'est le rôle principal, je veux être généreux avec vous. Ce sera £1 par jour sans compter les dimanches!" Dewhurst a oublié de lui préciser qu'il devra également être l'accessoiriste principal et déplacer les meubles dans la pièce qui fait office de studio… Mais, les temps sont difficiles au théâtre, car la guerre vient de se terminer et de nombreux acteurs reviennent sur le marché. Le cinéma se révèle un moyen de gagner sa vie. Il continue donc à tourner des films.
La chance est de son côté car les jeunes premiers manquent cruellement aux théâtres londoniens à cause la guerre. En 1917, il décroche un rôle dans une pièce à scandale, Damaged Goods (Les avariés) d'Eugène Brieux, un auteur français en vogue à cette époque. La pièce s'attaque à un tabou que la bonne société se refuse à discuter, la syphilis. Il y tient le rôle d'un jeune époux qui a contaminé par mégarde son épouse. C'est un succès de scandale qui lui permet de se faire remarquer par un des pionniers du cinéma britannique, George Dewhurst. Ses premiers pas au cinéma ne semble guère l'avoir enthousiasmé. "Combien gagnerais-je?", demanda-t-il à Dewhurst. "Bien, c'est le rôle principal, je veux être généreux avec vous. Ce sera £1 par jour sans compter les dimanches!" Dewhurst a oublié de lui préciser qu'il devra également être l'accessoiriste principal et déplacer les meubles dans la pièce qui fait office de studio… Mais, les temps sont difficiles au théâtre, car la guerre vient de se terminer et de nombreux acteurs reviennent sur le marché. Le cinéma se révèle un moyen de gagner sa vie. Il continue donc à tourner des films.
Dans A Son of David en 1920, il joue le rôle d'un boxeur(?). Nous devons nous fier à son propre jugement pour ce film perdu. "Je devais gagner par knock-out un match contre un ancien professionnel qui aurait pu aisément me tuer et ne faire qu'une bouchée de moi! Quand je vis le film, mes conclusions furent que l'éclairage était épouvantable, mon maquillage et mes gesticulations également. Ma tête bougeait sur un corps qui semblait appartenir à quelqu'un d'autre. Totalement écoeuré, je souhaitais résilier mon contrat, mais, à mon grand étonnement, les producteurs m'assurèrent que j'allais m'améliorer!". Les films qu'il tourne à cette époque sont tous perdus sauf quelques bobines d'un film de 1918, The Toilers. Et il en serait probablement le premier ravi car il dit "J'étais un très mauvais acteur de cinéma à cette époque. Mon image à l'écran me semblait épouvantable et affreuse."
C'est en 1918 qu'il rencontre au cours d'un tournée théâtrale, Thelma Raye, une actrice qui a déjà un pedigree dans le West End. Il l'épouse en septembre 1919. Ce mariage va se révéler rapidement une erreur lourde de conséquences; Thelma est dominatrice et d'une jalousie maladive. Il se sépareront dès 1922; mais, il faudra à Colman plus de 12 ans pour obtenir le divorce. Mais, n'anticipons pas! A l'automne 1920, le travail en Angleterre, aussi bien au théâtre qu'au cinéma, se fait rare. Il décide d'aller tenter sa chance sous d'autres cieux. Il économise suffisament d'argent pour s'acheter un aller simple en 2ème classe pour New York. Il part avec bien peu de choses: trois cols de rechange, quelques vêtements et £8 en poche plus deux lettres de recommandations dont une pour D.W. Griffith. L'arrivée à New York se révèle fort difficile. Les studios de cinéma sont fermés; ses lettres se révèlent inutiles et il lui faut trouver rapidement un emploi quelconque pour subvenir à ses besoins. Après plusieurs mois où il survit difficilement, il arrive à obtenir de petits rôles à Broadway, suivis d'une tournée à travers les Etats-Unis pour une pièce de W. Somerset Maughan. Puis, la chance lui sourit lorsque Ruth Chatterton, une actrice très en vue, lui offre le second rôle masculin dans La Tendresse, une pièce d'Henri Bataille en 1922. Le critique redouté du New York Times, Alexander Woolcott écrit à son propos: "une excellente interprétation, franche et authentique est donnée par un acteur nommé Ronald Colman."
Au même moment, le réalisateur Henry King est à la recherche d'un acteur "de type italien" pour son prochain film avec Lillian Gish, The White Sister quand le photographe James Abbé lui recommande d'aller voir le jeune premier qui joue avec Ruth Chatterton à l'Empire Theatre. Séduit par les qualités de l'acteur et son physique de brun aux yeux sombres, il vient le trouver dans sa loge pour lui proposer de faire un bout d'essai. Colman est réticent; son expérience cinématographique en Angleterre ne l'a guère enthousiasmé. On lui a répété plusieurs fois qu'il n'avait aucune photogénie. Il se présente néanmoins au rendez-vous et King le fait parler pour le détendre. Il décide de modifier légèrement son apparence en lui dessinant une moustache avec un crayon de maquilleur, puis en lui lissant les cheveux en arrière. Gish et King sont ravis du résultat du bout d'essai. Il prend donc le bateau pour Naples en octobre 1922 avec tous les comédiens et techniciens du film. Gish et King, durant la traversée, lui inculquent les principes de l'interprétation au cinéma et lui font perdre ses manières théâtrales. Il s'adapte rapidement au nouveau medium et découvre que son image à l'écran n'est pas aussi affreuse qu'il le pensait! Il travaille, il est vrai, avec les meilleurs professionnels de l'époque qui ont une connaissance des éclairages largement supérieure à celle du cinéma britannique. Henry King éprouve quelques difficultés à lui faire tourner une scène qui réclame une violence d'expression qui lui est étrangère. Il lui faire boire quelques verres de whisky pour le détendre. La ruse fonctionne et la scène est dans la boîte! La vision de The White Sister aujourd'hui révèle un acteur naturel, infiniment plus moderne que ses contemporains (Valentino et Gilbert). Son image est déjà là parfaitement définie: l'élégance, les bonnes manières, l'humour et un charisme qui ne se démentiront pas durant 35 ans. Quand The White Sister sort sur les écrans New Yorkais fin 1923, il passe du statut d'acteur inconnu à celui de star. Plusieurs producteurs se disputent ses services. Il va signer avec un producteur indépendant qui vient tout juste de créer sa propre société: Samuel Goldwyn. Ce sera le début d'une association de 9 ans.
A suivre
3 commentaires:
Hello Ann,
Le parcours de Ronald Colman est-il typique des acteurs anglais de l'époque ? Il me semble que le cinéma anglais de l'immédiat après-guerre (la première) ne brillait pas particulièrement ni par la qualité de ses scénarios, ni par le brio de la mise en scène, ce qui a dû pousser pas mal de gens, professionnels ou en cours de le devenir dans ce milieu, à s'exiler à Hollywood, ce qui était peut-être moins le cas pour d'autres cinématographies européennes (scandinaves ou allemandes). Il aura tout de même eu une chance fantastique de rencontrer tout de suite King Vidor, qui a su repérer tout son potentiel, et l'aider à tracer les grandes lignes de son personnage.
Non, son parcours n'est pas typique pour cette époque. Il y a très peu d'anglais à Hollywood dans les années 20 (à part Chaplin!). Le grand afflux britannique viendra plus tard, à l'arrivée du parlant en 1930.Et il a été découvert par Henry King (pas Vidor, avec qui il travaillera plus tard en 32).
Oooops ! Mon clavier a fourché, je confonds toujours les deux "King" (bien qu'il s'agisse du nom d'un côté et du prénom de l'autre et que leurs styles soient différents), en plus, c'était clairement écrit sur (et sous) l'affiche...
Pour ce qui concerne les relations Europe-Hollywood, j'espère que tu auras l'occasion de les évoquer, compte tenu de l'importance de l'émigration qui a, en partie, façonné Hollywood.
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