Un film de Reginald Barker avec Frank Keenan, Enid Markey et Charles K. French
Sur la frontière turco-arménienne, le colonel von Werfel (C. K. French) opère avec un groupe de Kurdes dirigé par le dangereux Khan Ouâdaliah (F. Keenan). La ville de Kéraoussi est encerclée par les Kurdes. Les femmes seront livrées aux hommes du Khan à moins que la ville ne se rende. La fille de Werfel, Beatrice (E. Markey) se trouve parmi les malheureuses...
Ce film de Reginald Barker produit par Thomas H. Ince (qui s'approprie le crédit de la réalisation au générique) est absolument passionnant. Lorsqu'on lit le résumé de ce film dans le catalogue de l'American Film Institute, on réalise que la version française détenue par la Cinémathèque française (qui est la seule copie existante de ce film) est totalement différente. Dans l'original produit en 1915 -donc avant l'entrée en guerre de l'Amérique- le film n'était pas situé géographiquement mais suggérait vaguement la zone des Balkans avec un officier français nommé Damien. Lorsque le film est distribué en France en 1917, le colonel devient allemand sous le nom de von Werfel. Et on déplace le conflit vers la Turquie à l'époque du génocide arménien. Alors que l'original se terminait sur un plaidoyer pour la paix (le colonel se réveillait d'un cauchemar), la version française de 1917 devient un instrument de propagande anti-allemande. Le contenu du film est un brûlot de première catégorie. Les troupes Kurdes qui assistent le colonel allemand sont des soudards sans foi ni loi qui ne songent qu'a violer et à tuer. Quant à leur chef, il est prêt à tout pour obtenir des faveurs sexuelles de la part de la fille du colonel. La malheureuse est placée devant un choix effroyable: accepter de se donner à lui ou voir toutes les femmes du village être livrées aux soudards. La mort dans l'âme, elle accepte le marché sordide. Mais, après avoir été violentée, elle tue son bourreau. Sur ce, le colonel arrive et demande qu'on lui livre la meurtrière. Elle se rend voilée. Il fait fusiller sa propre fille et découvre ensuite effondré son identité. Le paroxysme du film est atteint lors du meurtre de l'ignoble Khan. Enid Markey, au bord de la folie, s'empare de son révolver et se dirige vers son violeur qui ronfle complètement saoul. Il n'y a aucun doute que la violence du film a dû profondément affecté les spectateurs de l'époque. Et il semble impensable que les français l'aient diffusé en utilisant le nom français du colonel. Avec ce changement de nationalité et ce déplacement géographique, le film reste profondément perturbant. Décidément, Reginald Barker mériterait d'être redécouvert car il fait partie des grands du début des années 10.
1 commentaire:
Bonjour Ann,
Le fait que les soldats de ce film aient des casques à pointe ne vous laisse t-il pas dubitative quand à la supposée nationalité originelle de l'officier?
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