Jeanne Vaubernier (P. Negri) est une simple couturière lorsqu'elle croise le chemin du Comte du Barry (Eduard von Winterstein). Il décide d'en faire sa maîtresse et de l'utiliser pour obtenir le paiment d'une dette royale. C'est alors qu'elle rencontre le roi Louis XV (E. Jannings) qui est conquis par son charme...
Cette superproduction historique est la première dans la carrière d'Ernst Lubitsch qui s'était jusqu'alors spécialisé dans la comédie. Le cinéma allemand a clairement l'intention d'exporter ses productions, notamment vers les Etats-Unis, et les moyens mis en oeuvre sont extrêmement importants: énorme figuration et vastes décors. Par contre, la vérité historique en prend un bon coup avec un scénario assez rocambolesque qui est surtout là pour amuser. Lubitsch continue sa collaboration avec Pola Negri et Emil Jannings dans les rôle principaux. Cependant, c'est bien Pola qui est la pièce maîtresse de cette oeuvre. le grand Emil est finalement peu présent en roi libidineux, mais il se rattrape avec une scène de mort haute en couleurs. Alors que Louis XV est sur le point d'expirer couvert de pustules de vérole, il arrache une bible des mains du prêtre venu lui donner l'extrême onction et réclame sa maîtresse! Pola Negri tient la vedette en fille du peuple devenue courtisane, puis favorite royale. C'est finalement le début du film qui est le plus réjouissant avec son rythme comique qui montre comment la Dubarry savait enjôler les hommes. Malheureusement, le ton tourne rapidement au tragique et l'on découvre avec stupéfaction que Jeanne Dubarry aurait été responsable - à elle seule - de la Révolution française par son comportement! D'ailleurs le scénario fait d'elle une victime du monde corrompu de la cour, en particulier du ministre Choiseul. Si l'on passe sur ces approximations historiques, cette grande machine lubitschiennne est néanmoins nettement plus comestible que les pensums tels que Anna Boleyn (1920) ou Sumurun (1920). Le rythme est soutenu et on ne s'ennuie pas une minute. C'est ce film qui a fait de Pola Negri une star internationale. Madame Dubarry est en effet sorti aux USA sous le titre passe-partout de Passion en octobre 1920. Ce fût un véritable événement outre-atlantique car c'était le premier film allemand qui y était exploité depuis la fin de la guerre. Pola Negri reçut des éloges dithyrambiques pour son incarnation de la Dubarry. Et on parla même du réalisateur comme étant de la trempe d'un DeMille ou d'un Griffith. Ce n'est guerre étonnant que quelques années plus tard Pola, Ernst et Emil traversèrent l'Atlantique pour venir renforcer les troupes hollywoodiennes...