Un film de Carl Froelich avec Giuseppe Becce, Olga Engl, Manny Ziener et Ernst Reicher
La vie et l'oeuvre du compositeur Richard Wagner.
Ce film biographique du compositeur allemand a été produit en 1913 pour célébrer le centième anniversaire de sa naissance. En 2013, il reparaît dans une nouvelle restauration pour la célébration de ses 200 ans. La vision de ce film permet de mesurer combien la vision de ce compositeur s'est modifiée en un siècle. En 1913, sa veuve Cosima Wagner était toujours vivante et en impitoyable gardienne du temple qu'elle était, on peut imaginer qu'elle surveillait toute oeuvre ayant trait à son époux. Le film de Carl Froelich est donc une hagiographie sur Richard Wagner où tous les aspects les plus antipathiques du personnage sont (sciemment) ignorés. En effet, il n'est fait nulle mention de son antisémitisme, de ses aventures extra-conjugales ou du ménage à trois avec les von Bülow. Wagner n'apparaît ici que comme un artiste incompris en proie aux cabales et aux complots des Jésuites (habillés bizarrement comme le Don Basilio du Barbier de Séville) et des ministres de Louis II de Bavière. Ceci posé, le film en lui-même est intéressant si on le replace dans le contexte de l'époque. C'est sans aucun doute une oeuvre ambitieuse visuellement qui tente de rendre palpable les visions de ce compositeur de génie ainsi que sa vie mouvementées de jeune révolutionnaire, ami de Bakounine. C'est le compositeur d'origine italienne Giuseppe Becce qui interprète Wagner tout en étant responsable de la composition de la partition orchestrale du film. Evitant un tournage entièrement en studio, le film nous montre de nombreux lieux importants dans sa vie, tel le Festspielhaus de Bayreuth. Quant à la partition de Becce, elle étonne en ce qu'elle ne veut pas un simple pot-pourri des oeuvres de Wagner. Au contraire, il cite Mozart, Beethoven et Rossini. La restauration et la réorchestration de celle-ci sont un travail d'orfèvre avec en plus au pupitre l'excellent Frank Strobel. Le film gagne immensément en ampleur grâce à ce travail. Becce est un Wagner crédible qui évite tout excès interprétatif. Certes, les libertés prises avec la vérité font sourire le spectateur averti comme lorsqu'on nous assure que Minna Wagner n'avait aucun raison de suspecter une quelconque relation entre son époux et Mathilde Wesendonck. Pire encore, il y a la soudaine apparition de Hans et Cosima von Bülow sans qu'on les mentionnent. Il faut dire que Richard a fait porter de belles cornes au malheureux Hans. Ses rapports complexes avec Meyerbeer sont éludés. On n'aperçoit que lors d'une courte scène son aîné (narquois) qui lui remet une lettre d'introduction qui va se révéler inefficace. Malgré ses défauts, le film est une oeuvre intéressante des années 10.