Séduction
Un film de Gustav Machatý avec Ita Rina, Olaf Fjord, Charlotte Susa et Theodor Pistek
Andrea (I. Rina), la fille d'un garde barrière, est séduite par George (O. Fjord), un étranger que son père a hébergé pour la nuit. Enceinte, elle doit fuir sa maison...
Il ne faut pas confondre ce film du tchèque Gustav Machatý (ci-contre) avec l'Erotikon (Vers le bonheur, 1920) de Mauritz Stiller qui est inspiré des comédies de C.B. DeMille telle que Don't Change Your Husband (1919). Le film de Machatý est une oeuvre de la fin du muet qui est totalement différente dans son propos. Le réalisateur utilise toutes les ressources techniques du cinéma d'alors pour nous conter une histoire somme toute fort simple. Comme pour les grands films européens de cette époque, on retrouve cette fluidité narrative et visuelle qui arrive à son épanouissement complet. Bien que Machatý ait passé un certain temps à Hollywood, il est évident que le style du réalisateur rappelle les meilleurs moments de G.W. Pabst ou de Hanns Schwarz. A partir d'une trame mélodramatique où une jeune fille est séduite et abandonnée avant de retrouver le bonheur en épousant un homme qu'elle a sauvé, il réussit à construire un petit chef d'oeuvre de sensualité qui est, de plus, bien en avance sur son temps. En effet, dès le début du film, nous assistons à la séduction d'Andrea par George qui donne lieu à une scène érotique toute en suggestion qui dépasse largement ce qu'on pouvait voir au cinéma à l'époque. Sans utiliser aucune nudité, il suggère le plaisir intense que ressent la belle Ita Rina. Même pour nos yeux blasés de spectateurs d'aujourd'hui, la scène conserve son pouvoir de séduction grâce à l'utilisation de symboles et de la caméra subjective. L'intérêt ne faiblit pas, bien que les scènes suivantes n'ont pas la puissance de celle-ci. Nous suivons l'itinéraire d'Andrea qui après avoir accouché d'un enfant mort-né rencontre par hasard un automobiliste qui la sauve des assauts d'un malotru. Devenu son épouse, elle se retrouve face à face avec son séducteur. Et soudain, le désir qu'elle ressent pour cet homme revient au point de mettre en danger sa nouvelle vie. Utilisant avec parcimonie les intertitres, Machatý dirige avec intelligence ses acteurs qui jouent admirablement avec leurs visages. L'actrice Ita Rina, qui était Slovène, joue son rôle avec ce qu'il faut de retenu et d'abandon, et, même l'autrichien Olaf Fjord, qui joua dans plusieurs productions françaises telles que La Madone des Sleepings (1927) où il était fort fade, montre un tout autre talent en séducteur impavide. Ce film tchèque est certainement un des tous meilleurs films de la fin du muet avec Die wunderbare Lüge der Nina Petrowna (1929, H. Schwarz) et Rotaie (1929, M. Camerini).
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