Un film d'Ernst Lubistch avec avec Mary Pickford, Irene Rich, Holbrook Blinn et George Walsh
Rosita (M. Pickford) chante dans les rues de Séville en se moquant du roi (H. Blinn). Elle est arrêtée pour propos séditieux. Un jeune officier, Don Diego (G. Walsh) qui avait tentée de la défendre est lui aussi arrêté...
Mary Pickford avait embauché Ernst Lubitsch en 1922. A l'origine, ils devaient tourner Faust, puis Dorothy Vernon. Mais, ils ne purent se mettre d'accord, donc ils se tournèrent vers Rosita, une version de Don César de Bazan. Les relations entre Lubitsch, fraîchement arrivé d'Allemagne, et sa productrice-interprète furent très tendues. Chacun voulait conserver sa liberté d'action face à l'autre qui voulait contrôler le film. Mary Pickford avait toujours eu un contrôle presque total de ses films au sein de son studio. D'ailleurs, pour cette production, elle ne ménage pas ses frais. Le Danois Svend Gade est engagé pour réaliser les décors gigantesques de Rosita en collaboration avec William Cameron Menzies. La dimension des plateaux vu sur grand écran laisse rêveur: ils rivalisent avec le château médiéval de Robin Hood (1922, A. Dwan) tourné peut de temps avant par son époux, Douglas Fairbanks. La petite Mary Pickford paraît minuscule devant les portails géants et les salles à haut plafond des palais. De ce point de vue, le film est une brillante réussite: la petite ville espagnole recréée en studio semble être réelle. De même, l'opérateur de Pickford, le génial Charles Rosher (qui gagna le 1er Oscar de la cinématographie en 1927 pour Sunrise) fait des merveilles. On sent là à quel point la cinématographie en Amérique avait de l'avance, à l'époque, sur celle des allemands. D'ailleurs, visuellement, le film est plus un film de Rosher que de Lubitsch. Son utilisation des silhouettes en ombre se détachant sur un immense décor en grande profondeur de champ est incroyable. Hélas, la seule copie de ce film qui a survécu est un vilain contretype russe où il faut deviner les beautés de Rosher. L'intrigue n'offre pas beaucoup de surprises. C'est surtout Mary Pickford qui tire son épingle du jeu en fille des rues sauvage et futée. Mais, elle avait eu des rôles bien plus intéressants (et plus complexes) dans Tess of the Storm Country (1922) par exemple. George Walsh (le frère de Raoul Walsh) est bien fade en jeune officier. Heureusement, il y a Irene Rich (qui sera plus tard Mrs Erlynne dans Lady Windermere's Fan) pour apporter un élément de subtilité en reine trompée qui fait tout pour faire échouer les amours de son roi. L'aspect comique du film avec les parents adoptifs -assez grotesques- de Rosita fait penser aux farces bavaroises du Lubitsch allemand comme Kohlhiesels Töchter. Le Lubitsch subtile, adepte de l'ellipse, n'est pas encore né à son arrivée en Amérique. Peut-être est-ce la vision de A Woman of Paris (L'opinion publique, 1923) de Chaplin qui le mettra sur la voie ? Pickford gardera un souvenir détestable de ce tournage et elle laissera à l'abandon le négatif du film (contrairement à ses autres films qui furent préservés). On ne peut donc découvrir ce film que grâce à une copie très médiocre qui ne permet pas d'en apprécier la beauté visuelle.
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