mercredi 2 février 2011

The Lodger: A Story of the London Fog 1926

Un film d'Alfred Hitchcock avec Ivor Novello, Mary Ault, Arthur Cheney et June

Un meurtrier mystérieux tue des jeunes femmes blondes tous les mardis soirs à Londres. Dans la pension tenue par Mrs Bunting (M. Ault), un nouveau locataire (I. Novello) arrive la nuit...

Ce film muet d'Alfred Hitchcock a été analysé en long et en large. Ici, je ne vais pas enfoncer les portes ouvertes sur les escaliers, les blondes, la culpabilité, etc. D'autres l'ont fait avant moi. Alfred Hitchcock réalise là un film criminel avec une mise en scène au cordeau qui utilise toutes les techniques du cinéma expressionniste, après avoir réalisé deux films en Allemagne. Le cinéma anglais de l'époque n'était peut-être pas aussi techniquement avancé, mais, il abordait des sujets sociaux avec bonheur comme Hindle Wakes (1927) de Maurice Elvey. L'autre grand réalisateur britannique des années 20 est Anthony Asquith qui fera un film très 'Hitchcokien' avec A Cottage on Dartmoor (1929). Le cinéma muet anglais n'est pas le désert aussi stérile que pourrait nous le faire croire certains. Le héros du film est interprété par Ivor Novello qui venait de remporter un grand succès dans The Rat (1925) de Graham Cutts où il est un 'apache' parisien. Hitchcock s'est souvent plaint dans des interviews ultérieures de devoir employer Novello pour le rôle du locataire. Je pense qu'Alfred n'est pas totalement sincère. Novello semble être le prototype du britannique élégant et distingué que Hitchcock utilisera souvent dans ses films. La séduction de Novello est utilisée au mieux avec des très gros-plans en soft-focus qui ne sont pas là par hasard. Quant au fait que son personnage ne soit pas le meurtrier, cela me semble au contraire intéressant. D'ailleurs, le remake de 1932 de The Lodger, à nouveau avec Novello, faisait de lui le coupable. Le film fut un échec.
Du point de vue visuel, le film est superbement construit. L'arrivée du locataire, le bas du visage masqué, qui apparaît dans l'encadrement de la porte est typiquement expressionniste. De même, la main qui court sur la rampe de l'escalier vue en plongée appartient au cinéma d'outre-Rhin. Mais, la reconstitution en studios de la cuisine de la logeuse est parfaite, recréant l'atmosphère d'une maison de la petite bourgeoisie au centre de Londres. Daisy, la fille de la famille (une actrice dont nous ne connaissons que le prénom: June) arrive à sortir de son milieu 'lower-middle-class' grâce à son travail de mannequin. On constate immédiatement la différence de classe avec le locataire qui est patente grâce à la silhouette élégante de Novello. Il est aussi en grand contraste avec le fiancé de Daisy, le policier fort pataud et maladroit interprété par Malcolm Keen. Devenu le suspect numéro 1, Novello est poursuivi par une foule hostile. Il se retrouve pendu par ses menottes sur une grille. On peut y voir une image quasi christique, de même lorsqu'on le descend de la grille telle une descente de croix. Sur le DVD MGM de la copie restaurée (du BFI), on peut apprécier la belle partition orchestrale de Ashley Irwin qui utilise des thèmes que l'on associe maintenant aux films d'Hitchcock rappelant Rozsa et Herrmann. Parmi les suppléments, j'ai particulièrement aimé l'interview de la petite-fille d'Alfred Hitchcock. Elle raconte comment, suivant une classe sur le cinéma, elle demanda à son grand-père de l'aider à écrire une dissertation sur Shadow of a Doubt. Ils l'écrivirent à quatre mains. Plus tard, la copie revint avec un C ! Hitchcock lui dit: "Sorry, I can't do any better!" Voilà qui pose des questions sur les interprétations esthétiques du cinéma à postériori...

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