N'oublions jamais
Un film de Léonce Perret avec Rita Jolivet, Hamilton Revelle et L. Rogers Lytton
A l'entrée en guerre, la cantatrice Rita Heriot (R. Jolivet) se retrouve prise dans l'avancée des troupes allemandes dans son village de la Meuse. Elle fait office de télégraphiste avant de se retrouver prisonnière des Allemands...
Cette production américaine de Léonce Perret est un objet cinématographique à la structure narrative étrange. Réalisé durant l'été 1917 après l'entrée en guerre des Etats-Unis, le film se veut une propagande pour resserrer les liens historiques unissant la France à l'Amérique. Malheureusement, il semble que le metteur en scène n'ait guère eu de contrôle sur le montage de son film qui était financé par le Comte Giuseppe de Cippico, l'époux de l'actrice Rita Jolivet qui tient le rôle principal. Au final, les critiques des journaux professionnels américains tirèrent à boulet rouge sur cette superproduction mal ficelée qui semble avoir été montée par un incompétent. Variety se montre particulièrement virulent en démolissant systématiquement un film qui a coûté une fortune pour l'époque: entre 175.000 et 200.000 dollars. Il faut dire que les producteurs n'ont pas lésiné sur les moyens: une énorme figuration, une reconstitution du torpillage du Lusitania et de plus, le décorateur Henri Ménessier a reconstitué en studio un village français entier pour ensuite le bombarder. Malheureusement, cette débauche de moyens ne produit qu'un film épisodique qui semble accumuler les évenements spectaculaires au détriment du développement des personnages. Par instants, on retrouve le talent de directeur d'acteurs de Perret, comme lorsque Rita se prépare à être fusillée, mais on retombe rapidement dans une abondance de clichés. L'ajout de nombreux extraits de bandes d'actualités n'arrangent rien car ils détournent l'attention de l'intrigue et sont de qualité bien médiocres cinématographiquement parlant. On peut imaginer la déception de Perret de voir son projet dénaturer de la sorte par un producteur. Cette déconvenue l'a certainement poussé a devenir son propre producteur pour pouvoir contrôler ses propres films de A à Z comme l'ont fait à la même époque ses compatriotes expatriés comme Albert Capellani et Maurice Tourneur. Cette citation de la critique de Variety donne bien le ton: "En tant que 'grand film', c'est l'un des plus mauvais jamais tournés ici, sous tous les angles. Les gens du cinéma riront bien de ses défaut." La cinémathèque nous a présenté une copie française reconstituée dont la qualité visuelle était très moyenne, ce qui n'arrange rien. Un Perret décevant.
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