Un film de Léonce Perret avec Fabienne Fabrèges, René Montis, Mme Vergny-Cholet et Armand Dutertre
Denise (F. Fabrèges) épouse, contre l'avis de ses grands-parents, Robert Laroche (R. Montis) dont elle est tombée amoureuse. La guerre éclate et Robert part laissant Denise enceinte. Quelques mois plus tard, Denise donne naissance à Jules. Ayant reçu une lettre désespérée de Robert, elle décide de partir vers le front pour lui amener leur enfant...
En 1915, Léonce Perret participe à l'effort de guerre en produisant des films patriotiques pour la firme Gaumont. Cependant, contrairement à de nombreuses bandes sans intérêt, Une Page de gloire est avant tout l'oeuvre d'un grand metteur en scène. Dès les premières minutes, il sait capturer l'intérêt du spectateur par son utilisation des décors naturels, sa science de la composition - secondé par son merveilleux opérateur Georges Specht - et son excellente direction d'acteurs. Lors de la séance à la Cinémathèque hier soir, les qualités de Perret ressortaient d'autant plus après une bande patriotique de Gaston Ravel, Le Grand souffle (1915), sans relief et un épisode des Vampires (1915) de Feuillade qui paraissait primitif en comparaison. Feuillade restait fidèle aux plans séquences et se préoccupait de l'action plus que de la psychologie des personnages, alors que Perret était attentif aux petits détails qui donnent de la profondeur aux personnages. De plus, il encadrait ses acteurs dans une vision poétique de la nature qui donne à ses images un souffle et une vie tout à fait extraordinaires. Le début du film est de ce point de vue magique. Denise retrouve son amoureux sous les arbres en fleurs dans une prairie aux longues herbes qui ondulent sous le vent. Le mouvement de l'image semble accompagner les sentiments de ses personnages; le paysage fait partie intégrante de l'intrigue. Dans cette nouvelle restauration numérique 2K, l'image est d'une nettetée et d'une pureté confondante et permet de mesurer l'extraordinaire beauté de la cinématographie. Léonce réussit à nous émouvoir avec cette histoire patriotique qui dans d'autres mains serait ridicule. Denise va risquer sa vie pour que son époux, au front, puisse voir leur enfant. Son voyage se révèle mouvementée et elle se retrouve sur la ligne de front sans le vouloir. Les Poilus ne sont pas enjolivés. On les voit dormir par terre ensemble durant leur temps de repos. Puis, lorsque Robert leur annonce la naissance de son fils, ils se lèvent tous en ensemble, joyeux, et trinquent avec le nouveau papa. Que ce soit dans les scènes intimistes du foyer ou dans celles de bataille, Perret montre son sens du détail et la composition picturale. Un grand film de Perret superbement restauré qui va être projeté également à la Fondation Jérôme Seydoux-Pathé la semaine prochaine. A ne pas manquer!
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